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Avec Pierrette, dans des vignes aux tranchées, il tissait aux quotidien l'émouvante histoire d'une famille beaujolaise soumise et broyée comme tant d'autres familles françaises dans l'effroyable tuerie de 14-18 qui semait la mort et la désolation sous un déluge de boue, de fer et de feu. Reprenant la plume là ou il l'avait laissée, Jean Reby Fayard se transporte, cette fois, quelque vingt ans plus tard, au cœur d'une autre tourmente celle de la seconde guerre mondiale, avec un autre livre intitulé, Ninette, des tranchées à la résistance. Un récit alerte et documenté qui remet en scène la même famille beaujolaise, la sienne. Mais un récit où l'héroine n'est plus Pierrette, mais Ninette sa fille, née en 1917, dix mois après que son frère fut tombé à Verdun et qui n'est autre que la mère de l'auteur.

Autant dire que le fils s'exposait à un pari risqué en entreprenant d'écrire ce gros livre de près de 400 pages.

Comment garder la distance nécessaire pour parler à voix haute de celle dont vous êtes si intimement proche ?

Comment risquer sur elle une parole publique : sans mièvrerie ni pathos et sans se laisser entraîner vers l'hagiographie sirupeuse, inodore et incolore ? l'écueil, le fils l'avait bien identifié : « pour atteindre à une certaine justesse de ton et de sentiments, il me fallait dépasser une naturelle et légitime pudeur... »

Alors, avec habilité de l'historien soucieux de situer ses personnages dans le temps réel qui fut le leur, Jean Reby Fayard retisse le temps d'alors, revient sur la Grande Guerre et ses conséquences sur la paix fragile de l'entre deux guerres, le front populaire, la guerre civile d'Espagne, la montée du nazisme... Et dans la trame de ce temps revisité, il donne vie à Ninette et aux siens. Avec tendresse et émotion, jonglant tour a tour du vécu et du romanesque, il dessine un portrait. Celui d'une femme et d'une mère : volontaire et sensible, humiliée et blessée parfois , mais forte toujours. D'abord sous les traits de la petit fille très tôt orpheline puis adolescente confrontée au remariage de son père et à l'arrivée d'une belle-mère dans la maison... Ensuite, de la toute jeune fille, pensionnaire, puis apprentie en couture, s'éveillant peu à peu à la conscience du monde comme il va.... Et qui, à l'aube de ses vingt ans, s'apprête à devenir maman quand elle rencontre l'amour de l'homme qui sera celui de sa vie : Marcel, un garçon venu de l'allier voisin, dont il est parti à cause de la guerre !

Une guerre omniprésente comme un peu partout en France

Une guerre désormais omniprésente dans le livre. Comme elle le fut un peu partout en France et plus précisément, dans ce beaujolais si cher à Jean Reby Fayard, avec son cortège de privations, de souffrances, de frustrations et de malheurs. Jusqu'à ces funestres journées de septembre 1944, quand la petite ville de Anse se terre sous les bombardement tandis que tue, pille, viole une armée nazie en déroute. Paroxysme de déferlement de haine et de violence de quatre années d'une occupation qui a sommé les uns et les autres de choisir : résister ou collaborer. A ce point de son récit, Jean Reby-Fayard n'idéalise rien de la réalité de la France profonde d'alors à laquelle appartiennent les siens : « A l'exception de quelques uns, les personnages que j'évoque n'étaient pas des résistants ; au sens où ils n'ont pas rejoint le maquis, ni organisé une armée secrète. Ninette, comme les siens, étaient sans héroïsme particulier... Mais avec générosité et courage, ils feront face. A leur propre souffrance, comme à celle des autres autour d'eux. Prenant ainsi humblement conscience de ce qu'était leur devoir et ce à quoi il les appelait ».

C'est avec ce même regard qu'il faut lire le livre de Jean Reby Fayard. Parce qu'il fait mieux que de rendre hommage à Ninette et aux siens.

Il ressuscite leur vie disparue au tamis de sa mémoire et de son cœur qui pense et se souvient. Pour leur dire ce que personne ne leur avait encore jamais dit : que leur vie eût du prix ! A cela que servent les mots, à cela que sert l'écriture. A rendre justice à la vie, à chacune de nos vies. Pour garder les traces. Comme des braises que l'on peut réveiller d'un souffle.

Claude Goure, journaliste